Employee Value Proposition vs Marque Employeur : décrypter et utiliser l’EVP pour attirer les talents
De plus en plus, les entreprises doivent composer avec un marché du travail ultra-concurrentiel où les candidats comparent les offres...
Face à l’instabilité géopolitique amplifiée par le conflit en Ukraine et les récentes actualités internationales, le gouvernement français a annoncé vouloir mettre en place une “économie de guerre”. En avril 2024, lors d’une visite en Dordogne pour une future usine de poudre, Emmanuel Macron a réaffirmé cette position en déclarant :
« L’effort à fournir est urgent, il faut aller vite, fort, massifier, mais il est aussi durable. »
La France dispose d’une Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD) importante, portée par 9 grands groupes industriels et 4 500 start-up et PME, ce qui représente près de 220 000 emplois directs et indirects.
Bien que le pays soit actuellement le 2ᵉ exportateur d’armes au niveau mondial, le gouvernement souhaite renforcer cette BITD, notamment en augmentant la capacité de production.
Afin de soutenir cette nouvelle dynamique, le Parlement avait adopté le 13 juillet 2023 la Loi Programmation Militaire (LPM) 2024-2030. Cette dernière prévoit un budget de 413,3 milliards d’euros pour moderniser et transformer l’armée française, soit 118 milliards de plus que la précédente LPM. Ce budget bénéficiera notamment aux industries de la défense qui devraient recevoir plus de commandes de la part des armées, augmentant ainsi leurs productions en termes de volumes et de cadence.
Au sein de l’Union européenne, les initiatives se multiplient pour favoriser les industries européennes :
Pour les industries françaises, l’enjeu n’est pas seulement de produire plus et plus vite, mais aussi d’exporter plus en Europe : à date, bien que la France soit le second exportateur d’armes dans le monde, l’Europe ne représente que 15% de ses exportations. Même si ces enjeux s’accompagnent d’opportunités, les industries françaises sont confrontées à deux défis majeurs : une quantité insuffisante de ressources produites au niveau national et le manque de main d’œuvre qualifiée.
Depuis l’allocution du président le 5 mars dernier et l’annonce d’investissements supplémentaires dans le domaine de la Défense, les entreprises du secteur connaissent une nouvelle dynamique et adaptent leurs organisations pour faire face à ces nouveaux enjeux.
Dans ce contexte, certains industriels relocalisent leurs sites de production : Eurenco, fabricant d’explosifs, de propulseurs et de carburants militaires, a par exemple ouvert une nouvelle usine de fabrication de poudre à Bergerac en mars dernier.
Les entreprises industrielles civiles adaptent aussi leurs stratégies : elles diversifient déjà ou envisagent de diversifier leurs activités en mettant à disposition leurs savoir-faire et leurs capacités de production au service de la défense. C’est le cas par exemple des industries automobiles, dont certains procédés comportent des similarités avec ceux de la défense. D’autres secteurs, comme l’industrie chimique ou de l’énergie, attirent aussi l’attention du ministère des Armées en raison de leur transversalité avec les nouveaux besoins.
Bien que cette nouvelle dynamique soit synonyme d’opportunités pour les entreprises, elle soulève aussi des défis importants pour les services RH en matière de recrutement et de gestion des talents.
Malgré les multiples initiatives pour dynamiser ce secteur d’activités, les entreprises sont confrontées à plusieurs défis majeurs en matière de ressources humaines :
En décembre 2024, la Direction Générale des Armées estimait à 10 000 le nombre de postes à pourvoir au sein des industries de la défense. Parmi les métiers du secteur les plus recherchés, on retrouve :
Face à un marché pénurique, le recrutement de ces profils rares nécessite non seulement des méthodes d’approche directe afin de les identifier et de les approcher, mais aussi une forte expertise technique et une maîtrise fine des processus d’évaluation.
En plus de la pénurie de compétences déjà constatée par les industries, celles qui réorientent leur production pour répondre aux besoins du secteur de défense sont confrontées à un nouvel enjeu : elles doivent désormais approcher des profils issus de formations différentes de celles habituellement ciblées pour intégrer de nouvelles expertises et méthodes de travail.
Cependant, les formations existantes peinent parfois à s’adapter aux évolutions des métiers, créant ainsi un décalage avec les besoins des entreprises.
De plus, les capacités d’accueil des formations techniques peuvent être insuffisantes en fonction des métiers : par exemple, une étude menée par l’Observatoire Paritaire de la Métallurgie en 2023 démontre que les formations aux métiers de chaudronnier (H/F), soudeur (H/F) et technicien de maintenance (H/F) ne couvrent que 50% des besoins en recrutements.
La mobilité des candidats et l’emplacement géographique des formations peuvent constituer des freins supplémentaires : ces dernières sont généralement situées dans les grandes villes, alors que les industries sont majoritairement implantées en dehors des centres urbains.
Pour répondre à ces besoins, malgré les contraintes, les industries de la défense peuvent avoir recours à plusieurs stratégies :
Au-delà des difficultés liées aux compétences, les métiers de l’industrie de la défense sont confrontés à un manque d’attractivité et à une image vieillissante ou peu valorisante, notamment envers les nouvelles générations qui s’insèrent sur le marché du travail.
Malgré la modernisation des métiers dans le cadre du développement du numérique et de la robotique, l’industrie peine à gagner en visibilité en dehors de son propre secteur d’activité.
Selon une étude de l’Usine Nouvelle, de la CCI et de la Fabrique de la Cité parue en 2024, 48 % des participants sont confiants en l’avenir de l’industrie et seulement 16% d’entre eux envisagent de faire carrière dans l’industrie.
En plus d’une méconnaissance à son égard, l’industrie souffre également de conditions de travail pouvant être perçues comme étant difficiles avec du travail posté, des horaires de nuit ou encore des contraintes physiques.
En effet, 23% des Français considèrent que les conditions de travail sont moins avantageuses dans l’industrie que dans d’autres secteurs d’activités, ainsi que la rémunération (34%) et le management (25%). (source : étude Usine Nouvelle 2024)
Pour faire face à ces enjeux, certains industriels revalorisent leurs grilles de rémunération afin d’attirer des nouveaux profils et de rester compétitifs. En parallèle, de nombreuses initiatives nationales sont déployées par les acteurs du secteur, comme le salon Global Industrie qui met en avant chaque année les métiers de l’industrie.
Alors que le recrutement est au cœur des enjeux de croissance et de compétitivité des entreprises, les services RH sont confrontés à des difficultés règlementaires en raison des forts enjeux du secteur d’activité.
Les industries de la défense sont soumises à des exigences de sécurité élevées dans le cadre des habilitations secret défense qui impactent les processus de recrutement. Ainsi, les contraintes réglementaires liées au recrutement constituent une étape supplémentaire qui peut durer plusieurs semaines, voire mois.
Au-delà des compétences techniques recherchées, l’évaluation des soft skills représente également un enjeu important : la discrétion, la rigueur, l’adaptabilité et l’intelligence émotionnelle sont des compétences comportementales essentielles, mais complexes à évaluer. Il est alors indispensable d’avoir un processus d’évaluation exigeant pour assurer des recrutements adaptés au secteur d’activité.